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Peu motivé.e aujourd'hui ? Bonne nouvelle : cela ne vous empêchera pas d'agir !

Selon B.J. Fogg, chercheur en sciences comportementales à l’Université de Stanford et fondateur du Behavior Design Lab, l’absence de motivation n’est pas un frein au passage à l’action.

Déconstruire le mythe : la motivation n'est pas le seul garant du passage à l'action...

Généralement, nous pensons que c'est parce que nous sommes motivés que nous passons à l'action. Pourtant, dans son livre Tiny habits (2019), B.J. Fogg nous explique que la motivation est une force psychologique complexe, qui n'est pas la seule responsable du passage à l'action.

La motivation est puissante, nous permettant de nous projeter vers le futur, de choisir nos objectifs (identifier les raisons qui nous poussent à vouloir agir) mais aussi peu fiable. En effet, la motivation fonctionne main dans la main avec le système émotionnel : elle est donc très sensible au contexte, ce qui la rend fluctuante et donc peu prévisible...

Un jour, nous sommes infiniment motivés pour passer à l'action ; le lendemain (voire quelques heures plu tard), plus du tout.

Comment assurer le passage à l'action, compte tenu des variations de notre motivation ?

Nous serions en mesure de passer à l’action quand trois ingrédients sont réunis au même moment : (1) motivation, (2) sentiment de capacité et (3) déclencheurs.

Behavior = Motivation + Ability + Prompt

Autrement dit, pour qu’un comportement survienne, il faudrait à la fois, être motivé.e par l’action, se considérer comme capable de la réaliser et y être incité.e (par un déclencheur interne : une pensée, ou externe : un rappel sur son téléphone, une situation précise...).

Le modèle comportemental de Fogg se lit selon 2 axes : horizontalement, le sentiment de capacité qui rend l'action plus ou moins facille et verticalement, le niveau de motivation qui est plus ou moins important. À cela s'ajoute le déclencheur, qui peut-être réussi (où le passage à l'action a bien lieu) ou échoué (on reste alors dans l'inaction). L'idée générale est la suivante : pour passer à l'action, il faut privilégier des actions simples (faciles) qui ne nécessitent donc pas beaucoup de motivation.

Bonne nouvelle : d’après B.J. Fogg, il est possible de passer à l'action avec un faible niveau de motivation, en insistant sur les 2 autres variables de l'équation : il faut d’une part, faire de l’action un comportement simple pour augmenter le sentiment de capacité (la variable Ability) et d’autre part, s’assurer que le déclencheur (la variable Prompts) n’échoue pas et provoque bien l’action.

#Modifier le sentiment de capacité : faire de l’action un comportement simple

Avec l’idée générale que plus un comportement est ambitieux, moins on a de chance de le réaliser, B.J. Fogg nous incite à simplifier autant que possible les nouveaux comportements que l’on veut mettre en place. Selon lui, le sentiment de capacité (Ability dans B = MAP) est la variable la plus fiable de l’équation.

Tout d’abord, il faut se demander en quoi le nouveau comportement, si difficile à réaliser, est trop ambitieux et identifier le(s) freins : quelle(s) sont la ou les raison(s) qui empêche(nt) les individus de passer à l’action ?

Les questions à se poser : le comportement prend-il trop de temps ? Est-il trop coûteux ? Demande t-il trop d’effort physique, ou mental ? Est-il trop difficile d’intégrer le nouveau comportement dans ses pratiques actuelles (sa routine) ?

Ensuite, B.J. Fogg préconise de faire du nouveau comportement “quelque chose de minuscule” en se focalisant sur l’action de départ, c’est à dire sur la première conduite qui permettra de passer à l’action (Starter Step) et d’adapter la suite. Par exemple, pour construire son "Elevator Pitch", il faudrait commencer par identifier ses 3 responsabilités phares.

#Bien choisir le déclencheur : planifier précisément où, quand et comment passer à l’action

Attention : aucune action n’est jamais réalisée sans déclencheur (le Prompt de B=MAP est fondamental dans le passage à l’action) ! Le choix du déclencheur est donc une étape essentielle. Il est possible d’utiliser trois types de déclencheurs :

  1. Les déclencheurs internes (person prompt), qui viennent de la personne (“se souvenir de…”). Cependant, chacun sait que sa mémoire n’est pas infaillible, que nous avons naturellement tendance à oublier des choses (et c’est normal !). Cette solution apparaît donc comme risquée, au sens où, même si vous avez réussi à simplifier au maximum un nouveau comportement, si vous oubliez de le réaliser, vous passez à côté du passage à l’action (le déclencheur aura ici échoué).
  2. Les déclencheurs issus de l’environnement (context prompt), qui viennent du contexte (post-it sur l’écran d’ordinateur, alarme sur son téléphone ou notifications, rappel d’un ami…). Théoriquement, cette solution n’est pas trop mal : un quelconque rappel devrait pouvoir capturer votre attention, et ainsi déclencher le passage à l’action, aussi simple soit-elle. Cependant, ce type de déclencheurs n’est pas toujours efficace car nous sommes continuellement sollicités par notre environnement (et par notre smartphone : mails, SMS, notifications de l’agenda...). Ajouter des rappels peut devenir stressant, nous faire basculer dans une surcharge cognitive qui ne nous laisse pas l’espace disponible pour traiter ces nouveaux déclencheurs, qui sont alors susceptibles d'échouer.
  3. Les déclencheurs par l’action (action prompt). L’idée est de réfléchir à l’endroit et au moment où l’on veut réaliser le nouveau comportement et ainsi, de déterminer les “conditions” dans lesquelles aura lieu le passage à l’action. Par exemple : si j'ai une réunion à animer avec mon équipe (condition), alors je prends 10 minutes avant pour me chauffer la voix (nouveau comportement). C’est cette solution qu’il faut privilégier pour déclencher le passage à l’action.

B.J. Fogg insiste sur l’efficacité de l’utilisation d’une habitude actuelle, soit un de nos propres comportements, comme “ancre” stable et solide à laquelle on va accrocher la nouvelle action, pour créer un déclenchement durable et automatique. Par exemple : le matin, en arrivant au bureau et avant d'ouvrir mes e-mails (la condition : une habitude que j'exécute chaque jour), je liste mes 3 principaux objectifs de la journée (nouveau comportement).

Take home message : la motivation n’est pas le seul garant du passage à l’action ! Pour encourager un nouveau comportement, il faut simplifier l’action autant que possible et bien choisir son déclencheur.

Il peut être difficile de suivre ce méthode tout.e seul.e, c'est pourquoi certains dispositifs spécialisés peuvent vous accompagner. C’est le cas de Fifty, un outil d’e-doing qui aide les collaborateurs à passer à l’action dans le cadre d’une transformation ou après une formation. La solution recommande des micro-actions personnalisées à mener sur le terrain, aide à les réaliser grâce aux sciences comportementales (le Nudge) et mesure le changement. Stop talking, start doing !



Fogg, B. J. (2019). Tiny Habits: The Small Changes That Change Everything. Houghton Mifflin Harcourt.